Un texte sur le visage

Lire un texte sur le visage de quelqu’un, ce n’est pas facile car au cours de la lecture les expressions du visage changent et modifient le sens et le mouvement du texte.
Il faut savoir suivre chaque trait, chaque regard, le plissement des lèvres et celui des yeux ; il faut sentir les modulations du souffle ; s’imprégner tout entier dans cette figure qui nous inspire, onduler avec elle, suivre et générer la moindre de ses émotions.

La fleur donne le fruit

On pourrait imaginer un champ de fleurs. Chacune tirerait de l’existence unique d’une femme ou d’un homme sa couleur, sa forme, le nombre de ses pétales, la saveur de son nectar, le parfum qu’elle exhale, la saison de son épanouissement. Ces fleurs seraient uniques comme l’est le vécu de chaque individu disparu ; éternelles comme un symbole coloré et vivant de la mémoire.

À la vue de cette étendue de fleurs vibrantes, nous prendrions conscience de la multitude, de la diversité, des ressemblances, des dissemblances, de cette inépuisable richesse de formes offertes par la nature et qui réside profondément dans le cœur des Hommes. Nous nous sentirions enfin à notre place, un parmi tous, ce tous formant le un, le tout.


Je ne sais pas pourquoi m’est subitement venue cette idée de voir la vie de tout humain s’incarner dans le corps d’une fleur. C’est de prime abord, j’en conviens, peut-être un peu naïf mais, à y regarder de plus près, l’exercice s’avère riche de potentielles découvertes : quelle partie du corps, de l’esprit ou de l’âme représenteraient la dentelure des feuilles, la hauteur de la tige, la courbure des étamines, la densité de la gaine, l’envergure de la corolle, le diamètre du stigmate ou la finesse du style ?

Si l’expérience vous tente, imaginez-vous en fleur et vous vous rendrez compte que ce n’est ni simple ni anodin… et que l’on peut apprendre à se connaître grâce aux multiples biais de l’imagination.

À la dérobée

Ce soir, en recherche d’inspiration, je me suis permis de subtiliser un mot dans un sms que ma tendre moitié redigeait à mes côtés. Voici le résultat :

C’est une porte pas comme les autres, une porte qui ne se dérobe pas ; on pourrait même dire qu’elle s’affiche.
Elle invite les inconnus, elle détourne les artistes, elle déroule le tapis rouge, elle comble d’honneur, elle intimide aussi, elle écrase de tout son poids, elle s’interdit.
C’est un filtre, un privilège, une obligation.
Elle ? C’est l’entrée officielle, impressionnante le jour, bien visible la nuit.

Expérience #01

Voir un film comme on rêve.


Je me souviens de m’être endormi devant Un homme qui dort de Bernard Queysanne et Georges Perec et m’être réveillé, pénible ouverture des yeux, face à un champ de ruines surmonté d’une cuvette de toilette en feu. Impérissable sensation de bien-être où l’irrél prend le dessus et m’enveloppe.

Georges Perec, Bernard Queysanne et Jacques Spiesser.

Georges Perec, Bernard Queysanne et Jacques Spiesser.