Entre les colonnes, la créature s’acharne. Elle dépèce sa victime à coups de dents, les mains plongées dans les chairs, fouillant les organes à la recherche de vie.
Elle a cru le narval ailé et sa suite angéolée. Pourtant, toujours enracinée dans son labyrinthe, elle nage dans le sang caillé et les excréments acides de la peur.
Une petite musique lancinante meuble l’espace de son crane et habille toutes ses pensées d’ambre et d’espoir. C’est une chanson qui parle de miel, de coutumes ancestrales, de falaises et de sémaphores. Il est des temps brûlants et d’autres hurlants mais pour quelques heures c’est le calme. Les entrées sont entravées, la nuit est tombée sur le soir. Les mouches ne sont plus si bruyantes sur les carcasses faisandées. Il est possible à nouveau de rêver, d’envisager les cendres autrement que par leur relent gris-de-ruine. De dormir dans les braises jusqu’à l’éveil d’une faim nouvelle et l’appel de meurtres en cohorte qui rallumeront le phare de la dévastation.
Oui, il est temps déjà d’oublier les poètes et de se jeter dans le tumulte d’une action sans fin, de s’enivrer jusqu’au dégoût, jusqu’à se perdre et oublier ; jusqu’au cri qui soudain électrise et brise ce mouvement que l’on ne savait pas accomplir.